Il y a soixante-dix ans … le chant des partisans

De tout temps le chant est un catalyseur, il unifie les groupes qui ont un même idéal, un objectif commun. C’est une force dans l’action joyeuse ou difficile. Le chant militaire en est bien l’illustration : aux heures du combat, il « donne du cœur au ventre » à ceux qui doivent affronter l’ennemi et chaque régiment garde, par sa musique, la mémoire de ses temps héroïques, de ses heures glorieuses. Dans le répertoire de la chanson française, certains de ces chants sont entrés dans la mémoire collective. Ils parlent tous de gloire, de liberté d’immortalité mais aussi de combats, de violence, de sang et de mort, comme par exemple :        

« Le régiment de Sambre et Meuse

Reçut la mort au cri de Liberté,

Mais son histoire glorieuse

Lui donne droit à l’immortalité ».

 Parmi eux, il y a bien entendu « La Marseillaise » qui fut composée à Strasbourg en 1792 par un jeune officier, Claude Joseph Rouget de Lisle, sous le nom de « Chant de guerre de l’armée du Rhin ». Son titre définitif lui a été donné la même année lorsqu’un régiment de volontaires marseillais, montant sur Paris, chanta tout au long de son parcours « Aux armes citoyens, formez vos bataillons, marchons, marchons… » dont ils avaient reçu le texte à leur départ. La Marseillaise fut adoptée définitivement comme hymne national en 1879 ; elle avait été interdite sous l’Empire et la Restauration comme elle le sera sous l’occupation allemande (1940-1944) et remplacée alors par « Maréchal nous voilà » qu’on apprenait à l’école.

C’est durant cette douloureuse page de notre histoire nationale que fut composé le 30 mai 1943 « Le chant des partisans », par Joseph Kessel et son neveu Maurice Druon, deux futurs académiciens, expatriés volontaires à Londres. Ils se sont inspirés d’une chanson d’origine bolchevique qu’Anna Marly, réfugiée à Londres, avait composée en russe, sa langue maternelle, en 1941 ; le chant des partisans en est la variante française. En devenant l’indicatif de la BBC qui diffusait deux fois par jour l’émission « Honneur et Patrie » sur les ondes françaises brouillées par l’occupant, le chant des partisans deviendra symbole de la Résistance et signe de reconnaissance des maquis. On le sifflait pour ne pas se faire repérer par l’ennemi qui, malgré ses tentatives, n’est pas arrivé à rendre la mélodie inaudible à la radio.

Germaine Sablon, la sœur de Jean, donna sa forme définitive à la chanson qui, larguée par la Royal Air Force sur la France occupée, se répandra dans les milieux de la Résistance et des Forces françaises de l’intérieur.

 Ce chant fut interprété plus tard par de nombreux artistes, dont Yves Montand. C’est au son du « Chant des Partisans » remis à l’honneur à cette occasion, que le 19 décembre 1964 le général de Gaulle accueillait au Panthéon les cendres (présumées) du préfet Jean Moulin, martyr de la Résistance. Le discours qu’André Malraux prononça ce jour-là de sa voix inoubliable, se terminait par « entre ici Jean Moulin »  resté dans les annales de la République et dans la mémoire collective.

Aujourd’hui, le Chant des partisans suit bien souvent La Marseillaise lors des célébrations aux monuments aux morts des 14 juillet et 11 novembre. C’est un symbole très fort et particulièrement émouvant pour ceux qui ont vécu au temps de la dernière Guerre. Que dire du frisson ressenti quand des corbeaux s’abattent sur nos plaines !

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