En bavardant avec Jean-Jacques

Bonjour Monsieur Rousseau. Il m’est agréable de passer du temps avec vous pour les amis du journal « Les Echos de Meulan ». Cela semble irréel, mais il faut que je vous dise : nous cherchons chaque année des évènements antérieurs à l’époque où nous vivons. Nous sommes en 2012 et dans quatre mois, le 28 juin, ce sera votre anniversaire ; entre temps, nous aurons un nouveau président car nous vivons sous la Vème République.

J.J. Rousseau : « Oui, je suis né le 28 juin 1712 à Genève en Suisse ; je n’ai hélas ! pas connu ma mère et mon père m’a abandonné lorsque j’avais 10 ans ; c’est mon oncle qui m’a élevé ».

Odile Barthélémy : « C’est bien triste. Quel genre d’enfant étiez-vous ? ».

J.J.R. : «  Un enfant rêveur à l’âme vagabonde. J’aimais courir dans les bois, regarder la nature, observer les animaux au grand regret de mon oncle. Pourtant une dame, Madame Warens, ma bienfaitrice, attachera toute son influence pour parfaire mon éducation et me convertira au catholicisme, car il faut que je vous avoue que mes parents étaient calvinistes ».

O.B. «  Quel était le régime politique à votre époque ? ».

J.J.R. : « En 1722, j’avais donc 10 ans, c’est l’époque de Louis XV, la vie mondaine, la brillante civilisation artistique et littéraire, la prospérité de la bourgeoisie. A 30 ans, je me lie d’amitié avec Diderot qui me demande d’écrire des articles sur la musique pour l’Encyclopédie. Je suis alors en ménage avec Thérèse Levasseur et nous avons deux enfants. »

O.B. : «  J’ai lu dans des livres d’histoire que l’on vous dit philosophe ».

J.J.R. : « Oui, l’époque que je traverse est « l’esprit des Lumières  » mais je rejette les régimes autocratiques, où tout est commandé par une seule personne ».

O.B. : «  Si je peux me permettre, c’est le roi qui commande ».

J.J.R. : « C’est vrai mais cela ne me convenait pas et puis ma vie professionnelle n’allait pas. Donc je me suis réfugié en Suisse, aux environs de Neuchâtel, le pays heureux. J’y décris un spectacle agréable et peut-être une terre, une montagne couverte d’habitations dont chacune fait le centre des terres qui en dépendent, des habitants tout à leur aise, francs de taille, d’impôts et de corvées, cultivant tout, chacun pour sa famille ».

O.B. : « Hum ! Ca ressemble un peu à de l’autarcie ou bien à une vie réglée comme une horloge ».

J.J.R. : « Non, simplement des gens qui savent ce qu’ils ont à faire sans les obliger ou leur imposer une façon de vivre. D’ailleurs, ce sera le thème central de ma philosophie : l’homme naît tout naturellement bon et heureux, c’est la société qui le corrompt et le rend malheureux.

O.B. : «  En feuilletant une revue parue récemment dans mon département, j’ai lu que vous aviez vécu à l’Ermitage à Montmorency  ».

J.J.R. : « Eh oui ! Quel moment délicieux ; tout convenait pour m’exprimer. C’est là que j’ai écrit quelques-unes de mes œuvres : Emile, le Contrat social. La colline boisée devint pour moi un havre de paix et de verdure. Je n’ai commencé à vivre que dans les années de 1756 à 1762 ; durant cette période, tous mes vœux se sont accomplis ; j’écris à Monsieur Malesherbes. L’Ermitage me permet de m’évader du tourbillon social parisien dans lequel je ne suis pas à mon aise. Madame d’Epinay met à ma disposition ce petit pavillon qui m’avait frappé au détour d’une promenade et je me souviens lui avoir dit : « Ah ! Madame, quelle habitation délicieuse !  ». Elle m’avait répondu : «  Mon ours, voilà votre asile ; c’est vous qui l’avez choisi, c’est l’amitié qui vous l’offre  ».

O.B. « Et vous y êtes resté longtemps ».

J.J.R. : « Une rencontre avec Sophie d’Houdetot au printemps 1757 va tout bouleverser ; malheureusement, je serai obligé de quitter le pavillon ; j’emménage avec ma femme Thérèse dans une petite maison, le Mont-Louis, surplombant la vallée de Montmorency. Les années qui suivent ne m’apportent que des soucis, à cause de mes écrits. Ils seront interdits et brûlés ; Voltaire, lui-même, demandera la peine capitale à mon égard.

De 1766 à 1769, j’écris « Mes confessions ». En 1773, je confectionne un herbier pour Madelon Delessert que le musée Jean-Jacques Rousseau possède. 

Mais dites-moi, je suis surpris que l’on parle de moi, trois cents ans plus tard ! »

O.B. : «  De vous, et de bien d’autres écrivains et philosophes qui vécurent avec vous ».

En 1778, le 2 juillet, Jean-Jacques Rousseau meurt à Ermenonville. Le 11 octobre 1794, ses cendres sont transférées au Panthéon.

Ainsi l’influence de Jean-Jacques Rousseau sera majeure, aussi bien dans le domaine de la philosophie politique, en nourrissant la réflexion sur la démocratie, que dans le domaine de la littérature et au-delà dans les comportements, avec la place nouvelle faite à la sensibilité qui s’épanouira au début du siècle suivant avec le romantisme.

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