Le Sacerdoce des baptisés

En cherchant à définir la place et le rôle des laïcs dans l’Eglise, le concile Vatican II, dans sa constitution Lumen Gentium, a mis en lumière le « sacerdoce commun des baptisés ». Le baptisé est-il prêtre ? Pourquoi le qualificatif de « commun » qui semble dévaloriser ce sacerdoce ? Nous aimerions comprendre le sens de cet enseignement du concile.

 

L’unique sacerdoce du Christ

Le sacerdoce désigne une médiation dans la relation entre Dieu et les hommes. Chez les Juifs, au temps de Jésus, cette médiation était exercée par les prêtres qui sacrifiaient des animaux à Yahvé, au nom du seul peuple juif. Un sacrifice qui devait être perpétuellement renouvelé. Dans le Nouveau-Testament, Jésus, fils de Dieu et fils d’homme, offre sa vie à Dieu son Père pour le salut de l’humanité tout entière. Une offrande unique, parfaite, définitive. Un salut destiné à tous les peuples et couvrant toute l’histoire du monde. Il n’y a, de ce fait, qu’un seul médiateur.

Il n’y a pas d’autre prêtre que le Christ, ni d’autre sacerdoce que celui du Christ.

 

Si on associe la prêtrise à la prédication et à l’administration des sacrements, c’est-à-dire au sacerdoce dans sa forme ministérielle, il est bien difficile de concevoir le sacerdoce des baptisés. Le sacerdoce ministériel, qui est une participation à l’unique sacerdoce du Christ, est un service ordonné au peuple chrétien, une mission spécifique.

 

Le sacerdoce des baptisés (qu’exercent aussi les ministres ordonnés) est également une participation à l’unique sacerdoce du Christ. Pour en saisir la nature, il faut élever le regard jusqu’au plan spirituel, là où tout est vécu dans l’unité, c’est-à-dire dans la dépendance totale de chaque baptisé au Christ et par là même de tous les baptisés entre eux. L’allégorie de la vigne, tirée de l’enseignement de Jésus, illustre bien ce qu’est l’unité : « De même que le sarment ne peut pas de lui-même porter du fruit, sans demeurer attaché au cep, ainsi vous non plus, si vous ne demeurez en moi. Je suis le cep, vous êtes les sarments. Qui demeure en moi, comme moi en lui, porte beaucoup de fruit, car hors de moi vous ne pouvez rien faire » (Jean, ch.15 v. 4-5).

 

Le sacerdoce commun des baptisés.

Pour prolonger l’allégorie, disons que le baptême greffe le nouveau chrétien sur le Christ, comme le sarment peut être greffé sur le cep, pour vivre de sa sève. Dans cette unité de vie, le fruit de la vigne est à la fois le fruit du cep qui fournit la sève et celui du sarment qui porte la grappe.

De même pour le baptisé. Dans l’unité, il participe à la mission sacerdotale du Christ et plus sa vie spirituelle est intense, plus sa vie tout entière devient culte, louange à Dieu et intercession pour l’humanité. Dans l’unité, tous les baptisés coopèrent à cette mission et aucun ne peut se prévaloir d’une action solitaire. Le sacerdoce des baptisés est exercé « en commun », d’où la formule du concile.

 

Sacerdoce et eschatologie (1)

Si ce sacerdoce est avant tout une réalité spirituelle, il a son rôle dans la vie de l’Eglise, tout comme le sacerdoce ministériel et sans se confondre avec lui. Le dernier concile a mis particulièrement l’accent sur l’Eglise, Peuple de Dieu, donnant à tous les baptisés une égale dignité, qu’ils soient clercs ou laïcs. Face aux grandes transformations auxquelles fait face l’humanité (une multiplication par quatre en un siècle, une interaction très forte des cultures, une disparité très grande de la richesse et des modes de vie, etc.), tous les baptisés sont appelés à prendre leur part dans l’action de l’Eglise pour affirmer l’égale dignité de tous les humains, leur droit au bonheur et leur droit au salut qu’apporte le Christ.

Cette action apostolique, au nom et pour le bien de tous, peut prendre bien des formes suivant les talents de chacun et les circonstances. Voici une illustration. En ce début de XXIème siècle, le matérialisme domine la culture occidentale et tend à s’étendre à toute la planète. Le matérialisme refuse l’idée d’un Dieu créateur et aussi d’une destinée qui dépasse la vie terrestre. Il apporte la vision d’un univers clos (tout vient de l’Energie/Matière et tout y retourne ; l’acte conscient est un phénomène émergeant de cette Energie/Matière, fruit du hasard et sans véritable but). Face à cette culture de l’enfermement, le baptisé, par ses actes et son discours, montre que la vie présente est une étape de préparation à une vie infiniment plus intense, celle du Christ, une vie déjà là en puissance et qui ne demande qu’à s’actualiser. Il est agent d’une vérité plus haute, ouverte sur le divin.

Daniel Pasquiet

 

1 – L’eschatologie est le discours sur la fin des temps, sur l’ultime destinée du genre humain.

 

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