Les agridrones

…UNE (PETITE) RÉVOLUTION DANS L’AGRICULTURE

Le drone, ce drôle d’engin volant sans pilote humain qui peut recevoir des ordres en vol, est entré de plain pied dans notre monde. A partir d’Internet par exemple, n’importe qui peut en faire l’acquisition pour quelquefois moins de 300 €. Alors, gadget pour adolescent ? Espion indiscret ? Arme militaire sans discernement ? Sans doute un peu de tout ça, mais en tous les cas, ces nouveaux oiseaux, très utilisés par l’armée, trouvent maintenant une application plus pacifique en agriculture, un domaine dans lequel ils s’avèrent être un précieux allié !
Les images qu’ils fournissent, basées sur un modèle physique le plus souvent une analyse spectrale, permettent d’estimer certaines caractéristiques des cultures (surface foliaire, teneur en chlorophylle par exemple) ; elles sont ensuite exploitées par l’agriculteur et permettent de prendre des décisions : entre autres, l’ajout ou non d’engrais azotés ou le traitement par un pesticide approprié. 
Des techniques récentes, mettant en jeu des capteurs perfectionnés, permettent aussi de détecter les mauvaises herbes en croissance, surtout dans les grandes cultures. Contrairement à ce que l’on pourrait penser de prime abord, cette utilisation devrait aboutir à une réduction de l’utilisation des pesticides, limitant ainsi leur usage à des zones infestées, au lieu de pulvériser la parcelle complète.
En France, quelques entreprises proposent maintenant ces outils modernes ; leur chiffre d’affaires était d’environ trois cents millions d’euros en 2015 et certaines études prévoient que ce marché pourrait atteindre vingt-neuf milliards d’euros au niveau mondial en 2020. Grâce à ces engins, après une formation de quelques jours, qui permet d’obtenir un brevet équivalent à celui passé par les pilotes d’ULM, un agriculteur est capable de faire voler ces petits aéronefs et surtout d’analyser les données qu’ils génèrent. Une entreprise comme « Airinov », pionnière dans ce domaine a maintenant près de dix mille clients en France et la plupart d’entre eux ne regrettent pas leur investissement car les économies qu’ils engendrent sont réelles ; mais ce gain n’est pas seulement économique ; dans le cas des céréales par exemple, les utilisateurs de drones constatent que les produits récoltés sont de meilleure qualité. Une étude menée dernièrement dans l’ouest de la France a montré que les grains récoltés, suite à une analyse par drone, sont plus riches en protéines.
Le bonheur semble total, mais il reste un obstacle difficile à maîtriser …la météo et en particulier le vent ! En effet ces drôles d’objets volants ne peuvent pas prendre l’air dans n’importe quelles conditions et surtout cette « in-maîtrisable » météo peut venir gâcher tout le travail fait en amont.
Les drones jusqu’ici surtout utilisés pour les cultures de céréales, blé ou maïs, gagnent maintenant le domaine de la viticulture ; certains gros viticulteurs, surtout dans le Bordelais, sont aujourd’hui équipés de ces appareils et utilisent leurs capacités pour optimiser les traitements et surtout le meilleur moment de leurs récoltes.
Il est tout de même important de rappeler que n’importe qui ne peut utiliser ces drones. Si l’agriculteur veut le mettre en œuvre lui-même, il lui faudra non seulement l’appareil, un budget de l’ordre de 20 000 € au moins, mais, comme nous le disions, obtenir une certification officielle de télé-pilote ; il s’enregistrera alors comme opérateur auprès de la DGAC (direction générale de l’aviation civile) et devra être déclaré à la préfecture. Si ces démarches lui semblent un peu longues, il peut bien sûr faire appel à un opérateur qualifié pour piloter son engin ou bien demander à un prestataire qui viendra alors avec son drone faire le survol et assurer l’exploitation des images.
Alors, est-ce demain que nous verrons nos agriculteurs muter en pilotes d’avions ? Peut-être, mais comme nous l’avons expliqué, l’utilisation de ces drones reste assez technique ; elle est pour l’instant réservée à des cultivateurs avant-gardistes. Il faut noter que des données précieuses peuvent être fournies aux exploitants agricoles via les images satellites. Cette technique utilisée depuis plus de dix ans a largement fait ses preuves ; peut-être ces deux solutions d’observation deviendront-elles complémentaires ?

Jannick Denouël

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