Les Psaumes : poèmes de Dieu, prières des hommes … ou l’inverse ?

Si les psaumes sont beaux, c’est de leur parfaite adéquation à la voix qui s’en empare et à leur fonction de faire prier. Les Psaumes sont essentiellement des instruments à prier.

Et si nous les connaissions mieux pour prier, comme Jésus les a récités ? Et si nous découvrions toutes les richesses de ces poèmes, poèmes de louange, cris jaillis du cœur de l’homme ? Les Psaumes disent la joie et la souffrance, la détresse et l’émerveillement, la révolte et la confiance, le désir et l’abandon. Ils sont aussi des questions : questions que l’homme pose à Dieu, questions que Dieu pose à l’homme. Le psalmiste écrivait pour garder trace de son expérience spirituelle et de son cri. Prier avec un psaume aujourd’hui est pour nous une façon de retrouver la vérité de ce cri, de le faire nôtre en s’inscrivant dans la suite des générations et en en faisant mémoire.

Les Psaumes forment le cœur même de la Bible. Ils ont été pour les fidèles de tous les temps une source intarissable de force et de consolation. Ils sont un miroir dans lequel se reflètent tous les états d’âme du croyant. Ils sont encore un écho de tous les sentiments que peut éprouver celui qui met sa confiance en Dieu : joie et douleur, espérance et découragement, confiance et doute, assurance et certitude, courage et crainte, reconnaissance et amour.

Ils sont pour nous un appel à adorer Dieu, à transformer toutes les circonstances de nos vies, peines, joies, dangers, persécution, en occasion de louange. Plusieurs fois, on a appelé le livre des Psaumes une petite Bible. Basile le Grand a dit que « dans ce livre se trouve une théologie complète ».

Effectivement, les Psaumes contiennent une totalité de vie. On se tient devant Dieu sans masque ni gêne ; à quoi serviraient d’ailleurs hypocrisie et fausse pudeur ? On ne joue pas à cache-cache avec le Dieu vivant, mais on vit devant lui tel qu’on est. Celui qui prie les Psaumes s’y met tout entier, avec une extraordinaire absence de réserve et de détours. La réponse du croyant se fait dans la langue de chaque jour, avec des cris et des clameurs, des imprécations, des colères et des injures, de grands abattements et des joies qui le soulèvent, dans l’allégresse de la libération et l’attente du Juge qui vient restaurer tout ce qui a été détruit. C’est au fond de l’abîme et dans l’éclat de la gloire que le peuple se tient devant Dieu. Toute sa vie est rassemblée dans ce culte parce que toute sa vie est don au Dieu de l’alliance, service et louange de ce Dieu.

Composition :

les exégètes estiment aujourd’hui que le livre est en fait une composition collective ; des 150 Psaumes, 100 sont signés dont 73 de David, 12 d’Asaph qui fut nommé chef de chorale par David, 10 des fils de Coré (ce Coré qui s’était révolté contre Moïse alors que le peuple qui avait quitté l’Egypte où il était asservi, était parti sous la direction de Moïse pour cheminer dans le désert en vue d’aller vers la Terre Promise), 2 seraient du roi Salomon, et 1 de Moïse lui-même, 1 d’Ethan et 1 de Héman, tous deux contemporains de David ; et 50 psaumes sont anonymes.

L’art de la poésie remonte fort haut en Israël ; le fait qu’un grand nombre de psaumes porte en suscription le nom de David provient de la tradition selon laquelle ce roi aurait été poète et musicien. David est devenu le poète des Psaumes, comme Salomon est devenu le sage du livre des Proverbes.

Nature de la poésie des Psaumes : pris individuellement, chaque psaume constitue une œuvre d’art dont la composition est soumise à certaines règles bien définies. Alors que dans la poésie occidentale c’est avant tout la rime et la structure du vers qui comptent, la langue hébraïque ne connaît pas la rime ; en revanche, elle utilise le vers et le rythme. Les vers hébreux se composent en général de deux parties qui se correspondent et se répondent, tantôt grâce à la répétition de la même pensée, sous une autre forme dans la seconde partie du vers : « Car je suis près de tomber Et ma douleur est toujours devant moi. » (Ps 38,10). Tantôt grâce au procédé de l’antithèse : « Car le Seigneur connaît la voie des justes Et la voie des pécheurs mène à la ruine. » (Ps 1,6). Tantôt, enfin, grâce à une légère progression de la pensée :

« Détourne de moi tes coups ! Je succombe sous les attaques de ta main. » (Ps 39,11). Telle est la règle essentielle de la poésie hébraïque. Elle lui donne son caractère. Jamais idée, plainte ou consolation, ne se présentent isolément ; elles sont toujours suivies d’une idée sœur qui leur fait écho.

Psaume chanté ou récité ? Le Concile Vatican II a fait du chant des Psaumes un élément favorisant la participation active des fidèles. Ce trésor de prière de l’Ancien Testament est reconnu comme l’un des modes de présence du Christ à son Eglise dans la liturgie. Les psaumes sont prière chrétienne parce qu’ils ont été prière du Christ lui-même ; à sa suite, l’Eglise a conservé la prière chantée, élément essentiel de la liturgie juive. Le mot même de « psaume » signifie « cantique à chanter au son d’un instrument ». Saint Paul a encouragé les premiers chrétiens à chanter le Seigneur par « des psaumes, des hymnes et de libres louanges » (Ep 5, 19). C’est tout le sens, à la messe, du psaume responsorial qui répond à la première lecture. Il est bon qu’il soit chanté par le psalmiste, l’assemblée participant au moins par un refrain. Exceptionnellement, il peut aussi être récité.

Chanté ou récité, le psaume fait partie intégrante de la liturgie de la Parole, il favorise la méditation de la parole de Dieu, « elle qui est plus douce que le miel, que le suc des rayons » (cf. psaume 18).

Eric Le Scanff

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