« …et d’y venir en pélerinage »

Au cours de la treizième apparition, la Sainte Vierge dit à Bernadette. « Allez dire aux prêtres…de bâtir ici une chapelle…et d’y venir en pèlerinage ». C’est la neuvième parole de la Vierge. Nous sommes le 2 mars 1858. La dixième et dernière parole sera le 25 mars suivant : « Je suis l’Immaculée Conception », dogme défini quatre ans plus tôt par le pape Pie IX.

Bernadette doit aller dire ce message au curé. Mais elle en a peur. Il faut dire que la petite fille de 14 ans est illettrée. Son père a été emprisonné deux mois pour vol de deux sacs de farine. La famille est en effet ruinée à cause des bouleversements de la nouvelle société industrielle. Elle vit dans un cachot humide, l’ancienne prison de Lourdes. Pour aller porter le message, Bernadette se fait accompagner. Que peut apprendre un curé, personnage révéré et craint dans la société de l’époque, d’une fille de 14 ans qui ne sait ni lire ni écrire, et qui plus est, est la fille d’un voleur qui a fait de la prison ?

Comment apprendre d’autres ? Telle est justement la question posée à de multiples reprises dans les fiches de travail du synode qui s’est déroulé au mois d’octobre 2023. Ces autres pouvant être des personnes en situation de pauvreté et de fragilité, d’autres Églises chrétiennes, des mouvements et associations ou encore des personnes consacrées. Il est intéressant de réfléchir à notre prochain pèlerinage sous le thème « et d’y venir en procession », avec le synode qui invite tout le Peuple de Dieu à se mettre en marche d’une façon renouvelée pour annoncer le Royaume de Dieu dans un monde ébranlé, anxiogène, marqué « par une troisième guerre mondiale livrée par morceaux » (pape François).

Accepter d’apprendre d’autres est une des caractéristiques de l’Église synodale, mais c’est une attitude radicalement nouvelle pour l’Église catholique. Le synode, c’est donc une démarche de conversion pour tous les baptisés, pape, évêques, prêtres, religieux, laïcs. Le synode, c’est un pèlerinage. À Lourdes, nous prierons pour ce synode qui vivra une deuxième étape romaine en octobre 2024. À Lourdes, nous mettrons en pratique cette invitation à mieux nous écouter pour apprendre de chacun et ensemble à mieux écouter ce que Jésus nous dit dans Sa Parole et dans nos cœurs. « Le synode, un processus de guérison conduit par l’Esprit Saint, un chemin de discernement spirituel qui se fait dans la prière et à l’écoute de la Parole de Dieu » dit le pape François. La conversion, c’est d’abord de se sentir chacun appelé à la conversion. Souvent, trop souvent, on critique les autres, surtout les responsables, quand on est déçu ou en colère. Or, avec le processus synodal pour tous, il s’agit que tous soient davantage acteurs de la vie de l’Église. C’est exigeant, car il est souvent plus facile de critiquer en évitant de s’engager. Il est paradoxalement plus facile de se laisser infantiliser, dans l’attente d’une parole verticale ou de consignes venant d’en haut, que d’avoir le courage d’une parole vraie avec son frère, fût-il prêtre ou évêque.

Alors, prêts pour Lourdes ? Oui, enthousiastes pour ce temps où nous allons apprendre des autres, quels qu’ils soient. Dans la surprise comme le curé de Lourdes qui reçoit le message de Dieu par l’intermédiaire de la fille la plus pauvre de Lourdes. Oui, pressés de vivre la joie de l’Évangile, avec Marie qui s’est laissée surprendre par Dieu. À nous aussi, Dieu réserve des surprises. Prêts ? Se déplacer à Lourdes, c’est être prêt à se laisser déplacer pour apprendre des autres, des plus petits d’entre nous.

Baudoin, prêtre.

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